mercredi 27 juin 2018

Carmen se rêve et là...


Mon travail se terminait à 17 heures. L’été les journées sont plus longues en été et je profitai des deux heures et demie qui nous séparaient du repas du soir pour aller en ville faire quelques achats, pour aller me promener ou pour me faire plaisir d’une glace ou une boisson fraiche à la terrasse d’un café. 

Ce jour-là, je rentrai sans passer par la ville, directement. 
Dans le hall de l’immeuble, je vis Kaitlin qui était pensive. Je n’aime pas voir mes amis tristes ! Je m’en inquiétai. Elle me répondit : « On m’a fait une cadeau : deux places pour Carmen de Bizet ce soir à l’arène et mon copine Joan est partie. » (Fautes d’orthographe faites intentionnellement car Kaitlin parlait à peu près comme cela : comme une anglaise venue en France pour parfaire son français !) Je lui répondis : « Et c’est pour ça que tu es triste ? Mais, moi, si on m’avait offert une place pour aller voir un opéra, je serais content ! » Elle me dit alors, en retrouvant son sourire : « Alors, tu accompagnes moi ce soir ? Vraiment ? ». « Ce sera avec plaisir, » lui répondis-je. Et je vous assure qu’à ce moment-là, je ne mentais pas. 

Toutefois, je n’avais jamais vu d’opéra, hormis quelque extrait à la télé, et j’en avais une mauvaise opinion. J’avoue que le destin m’avait un peu forcé la main. Je n’allais quand même pas laisser une amie dans la tristesse ! Surtout une amie aussi jolie ! 

Le repas fut pris rapidement afin de nous laisser le temps de se préparer et d’aller, à l’heure, aux arènes de Nîmes. Trois mois que j’habitais « Nîmes la Romaine » et je n’étais jamais entré aux arènes. Il faut dire qu’entre mon travail et le sommeil, il y avait la mer de la Grande-Motte et la rivière du lieu-dit « la Baume ». Il restait donc peu de temps pour autre chose ! 

Ce fut une révélation. Nous avions les places les moins chères donc, apparemment, les plus mauvaises ! Mais, pour moi, c’étaient les meilleurs. 
De tout en haut des gradins, décentrés, je pouvais voir tout ce qui se passait devant la scène, le spectacle, et derrière la scène, le va et viens des acteurs, des hommes qui préparaient les chevaux, des femmes qui s’affairaient avec les costumes, les acteurs qui attendaient pour rentrer en scène, etc. Le monde du spectacle était là, devant moi. Car, vous qui avez vu un spectacle, si vous n’avez pas fait partie de ce qui se passe dans les coulisses, vous n’avez vu qu’une partie d’une certaine histoire, vous n’avez vu qu’une histoire aseptisée à force d’être répétée. Vous êtes passés à côté des émotions, les vraies, celles des acteurs, des machinistes, des maquilleuses, des costumières, etc. Je prenais plaisir à voir la vie avec ses rires et son stress. 

Et j’en oubliai (presque) mon amie. Évidemment, je partageais mes émotions avec elle et je crois que cela lui plut de voir un spectacle 'enrichi' car elle avait applaudi longuement. 

Et puis, ce fut la fin. 
La représentation terminée, nous quittâmes ce lieu magique avec des sensations nouvelles. Tout en suivant la longue file de spectateurs qui, comme nous étaient encore captivés par le spectacle, nous descendions les marches des différents étages quand il y eut une panne d’électricité qui surpris tout le monde. Dans le noir, Kaitlin rata une marche et s’accrocha à moi. Un certain temps se passa. La lumière se fit à nouveau. Nous n’avions pas bougé. C’est difficile de marcher quand on s’embrasse ! 

Georges Bizet (1838/1875) n’avait pas dû s’en douter la première fois (1875) où son opéra en 4 actes « Carmen » fut jouée (Ecrit d’après une nouvelle de Prosper Mérimée, 1803/1870) mais c’était assurément une grande histoire d’amour... 

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jeudi 21 juin 2018

Je ne sais pas pourquoi le destin


Depuis mon arrivée à Nîmes, il s’était écoulé trois mois. Et, je ne sais toujours pas pourquoi, c’était une vie qui me semblait paradisiaque. 
J’avais du travail, j’avais des amis, j’allais danser, je sortais et je passais le dimanche au bord de la rivière. 
Tout me semblait bien. 

C’est ainsi que j’avais vu le film « Saturday nicht fever » le mercredi, j’étais allé danser à une fête votive le vendredi soir et le samedi matin, je préparais, avec mes amis, un dimanche au bord de la rivière, à « la Baume ».
Nous avions prévu d’y aller dès le samedi 14 heures, après le repas de midi, et d’y rester jusqu’au dimanche soir 20 heures mais, un des amis ne quittait son travail que le samedi 19 heures, à la fermeture du magasin qui l’employait. L’un de nous devait se dévouer pour l’attendre et nous n’étions que deux à posséder une voiture. 
A pile ou face, le sort me désigna, je ne sais pas pourquoi, me privant ainsi d’une demi-journée de paradis. Les autres partirent vers les sources fraiches et les odeurs de thym, de lavande et de romarin. 

Je remontai donc dans ma chambre pour dormir ou lire un livre. C’est triste la solitude !
Pour couper au plus court, j’empruntai un couloir qui grouillait de bruits en semaine. Le foyer, essentiellement occupé par des étudiants était déserté. Ses occupants étaient repartis chez eux, pour ceux qui n’habitaient pas trop loin. Les autres, comme mes amis étaient partis à la rivière ou à la mer. Plus personne avec qui discuter. J’étais le roi du vide et du silence. Et l’ennui était aux aguets !
Les portes se succédaient, trente par étage et celle de ma chambre était au troisième et dernier. Le calme succédait à l’absence. On aurait pu entendre une mouche voler… On aurait pu mais, il faisait trop chaud et elles s’étaient mises à l’ombre en mode repos. Mon esprit aussi s’était mis en mode cool ; il s’était concentré sur le bruit de mes espadrilles qui raisonnait dans le long couloir vide qui me renvoyait l'écho. Quand soudain il me sembla entendre des sanglots.
Je m’arrêtais immédiatement. 

Comment ! Il reste quelqu’un dans le foyer et ce quelqu’un pleure ? 
Cela ne me sembla pas normal. Mon amie était repartie vers son pays du nord et m’avait abandonné, mes amis étaient partis au soleil près de l’eau et m’avaient laissé comme puni et ma famille était trop loin pour que j’aille y passer un week-end ; c’est moi qui étais seul ! C’est moi qui devais être le seul à être triste ! Mais, j’étais seul et je ne pleurais pas, j’écoutai. 

Je ne sais pas pourquoi, je frappais à la porte qui pleurait. Le silence se fit ; c’était la bonne. Un instant et elle s’ouvrit. Une fille au teint laiteux, aux cheveux jaunes, longs et raides ouvrit.
Elle était encore plus seule que moi, beaucoup plus loin de sa famille et sa seule amie, Joan, était repartie en Angleterre… Je compris sa douleur et réagis immédiatement. 

Je ne sais pas pourquoi je lui proposai de ranger sa peine dans une boîte à chaussures car il y avait du soleil au dehors (ce qui la fit rire) et « on » avait une ville à visiter (ses yeux bleus, cette fois, absents de nuage s’ouvrirent)  avant d’aller rejoindre des amis au bord de l’eau (un sourire se posa sur ses lèvres corail). 

Je ne sais pas pourquoi mais, elle accepta. 

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mercredi 13 juin 2018

L'influence d'un poète


Voilà quelques semaines que je vous raconte ma vie à Nîmes, entre la mer et la rivière le Gardon. Mais, je vais devoir faire un retour en arrière car sur Facebook un ami a demandé à toutes ses connaissances de raconter comment ils (ou elles) ont connu Georges Chelon. Et, ma rencontre avec ce poète-chanteur est tout de même assez intéressante. Lui-même, il ne s’en doute pas et, probablement, il ne le saura jamais. (A moins que ne lise ce post, évidemment ! Ce qui n’est pas certain du tout. )

A cette époque, avril 1977, j’habitai la Région Alsace. Je n’étais ni heureux, ni malheureux, avant, je vivais, sans plus. J’avais une amie qui avait plus d’études et d’expériences que moi et, en moins de deux ans, m’avait éveillé à tout. Elle m’avait montré qu’on peut travailler, évoluer, faire, rire, se divertir, se cultiver et même s’aimer. Un jour, pourtant, elle laissa tout, boulot, parents, logement et moi pour aller vivre dans le midi. 

Pour moi, ce fut un coup dur mais, je ne le réalisai pas tout de suite car j’avais eu un autre coup encore plus dur en même temps ; j’avais perdu ma mère et perdre sa mère à 20 ans rend tout le reste anodin, futile, insignifiant. D’autant que je m’étais retrouvé tout seul dans un appartement qui, lui aussi, me sembla vide et inutile… comme tout le reste, d’ailleurs. 

J’étais donc en dépression. Mais, à l’époque, ce mot n’existait pas vraiment. On se relevait et on continuait. Pas le temps de s’apitoyer sur son sort. Soit on fait, soit on en meurt. Et j’avais 20 ans, ni 15 ni 40. Je croyais que je vivais. 

Or, un jour, cette amie m’écrivit (à l’époque, c’était par la poste que se passait la correspondance) pour lui trouver le double vinyle de Georges Chelon « Je Me Souviens » ; elle avait fait tous les disquaires de Marseille à Toulon sans succès. Je lui répondis, présomptueusement : " Je le ferais !" et je me mis en quête de ce chanteur que je ne connaissais pas. 
Alors que je connaissais Marie Laforêt et il était sur une photo, guitare en main, avec ma chanteuse préférée du moment dont les yeux et la voix me faisaient... Bref !
Je le trouvai par hasard chez un disquaire indépendant qui était, à cause des grandes enseignes, proche de la fermeture définitive. Il n’en avait plus qu’un ! Il me proposa de l’écouter avant de l’acheter… et ce fut là une rencontre qui changea ma vie. 
 
Ce cher Monsieur Chelon avait écrit des textes que je ressentais « miens » : le Grand Dadais (c’était moi !), Sampa, Crève Misère, Je Me Souviens, Morte-Saison, Prête-Moi Tes Yeux, Père Prodigue, etc. des chansons que j’aurais aimé écrire… (Oui, car à l’époque j’écrivais des chansons !) 

Là-dessus, je décidai d’apporter moi-même le disque à mon amie. Je la retrouvai alors que j’étais en état de besoin, de tous les besoins. 
Ce qui contribua au changement, ce fut aussi ce que je trouvai ou retrouvai avec elle : les deux papillons de nuit pleins de délicatesse de la chanson « Soleil de Minuit » ou le nid d’amour (en mauvais état, de la rue Paradis, près du Vieux Port, à Marseille) de la chanson « Rue des Carrières » etc. et la mer et le soleil et une autre vie que je n’aurais jamais eue en restant ce « pas grand-chose qui n’avait (plus) de soucis qu’à s’occuper de lui » ! 

Je sautai le pas. Trois mois plus tard je partis pour le midi, une valise en carton à demi-remplie. Je m’installai à Nîmes car mon travail se trouvait là-bas. Et commencèrent pour moi les « vacances » que vous avez pu lire dans les post précédents. 

Donc, cher Monsieur Georges Chelon, sachez que maintenant, mes chansons, je me les fais avec mon vécu et d’ailleurs, je ne fais presque plus de chansons puisque je me suis tourné vers le polar.
Non, sérieux, je suis bien content que cette amie, involontairement, m’ait permis d’écouter du Georges Chelon il y a quarante ans. Il est génial et inépuisable. Ses mots me touchent encore ! 

En changeant de ville et de région, je changeai de vie. Voilà pourquoi en juillet 1977 je m'installai à Nîmes et je le dis encore : « Avant, j’avais tort de croire que je vivais ». 
Merci Georges. De ma terre, depuis, il est sorti plusieurs choses de bon. 

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jeudi 7 juin 2018

Le Grand Rassemblement


Avant tout, et pour rassurer mes amis qui m’ont posé la question, je dois dire que : « Oui, j’ai travaillé jeudi dernier. J’ai écrit un texte mais, je ne l’ai pas mis ; je l’ai jugé trop personnel. Je sais, c’est de l’autocensure. Mais, je le mettrai, avec d’autres, dans un prochain livre sur mes souvenirs. Comme ça, tout restera entre nous… » 
Et on peut commencer le nouveau texte.  

Finie « la Baume » ! 
En semaine, les jours étaient pareils aux jours précédents. Heureusement, on se rattrapait le week-end. 

Or, un samedi, plein soleil, il y avait un rassemblement de « chrétiens » aux arènes et nous avions dû différer notre visite de ce monument. Ce n’était pas grave puisque, contrairement aux vrais touristes, nous étions sur place et pouvions aller visiter l’endroit un autre jour. 

Comme d’habitude, après le repas, nous étions réunis dans la chambre de l’un de nous pour prendre le café et pour discuter de ce que nous allions faire ensuite. 

Une bonne discussion nous scinda en deux. Cinq d’entre nous décidèrent d’aller voir un spectacle payant et deux autres, qui y étaient déjà allés, n’étaient pas d’accord pour payer une nouvelle fois pour un spectacle qu’ils avaient déjà vu. Je faisais partie de ces deux récalcitrants. Et, le groupe parti, Didier et moi, nous en étions encore à nous demander quoi faire pour nous occuper. 

Didier me dit : « Puisque nous avions décidé d’aller visiter les arènes, nous irons visiter les arènes. » Je n’étais pas trop d’accord parce que la visite n’était pas possible ; y avait ce rassemblement ! Didier me dit : « Tu sais où on trouve les plus belles filles ? Les plus jolies, les plus naturelles… » Il m’intrigua. Je répondis d’accord. Ah, la curiosité ! 

Assis sur les gradins, nous regardions les espaces se remplir. Au milieu, une estrade avec des instruments de musique. Un monsieur, au micro, faisait des essais de voix. Autour de nous des personnes, jeunes, prenaient place. C’est vrai qu’elles étaient jolies, les filles, avec leur jupe ou robe d’été, légère et colorée ou en lin et entièrement blanche. A ce moment-là, il manquait peu, un regard, un sourire, pour que je me convertisse ! 

Mais, le sort en décida autrement.
Soudainement, de gros nuages lourds s’accumulèrent au-dessus de Nîmes et de nous. Tout se passa très vite. Les nuages cachèrent le soleil. Les musiciens bâchèrent l’estrade et leurs instruments. Une agitation se fit tout autour. Les personnes, à peine venues, se levèrent et rentrèrent dans les couloirs. L’orage éclata. L’arène se vida en un éclair. (Si je peux dire !) Des trompes d’eau se déversèrent. Il pleuvait des cordes, comme on dit. Les gens, autour de nous se mirent à prier. Moi, j’attendais que l’orage cesse, ce qui me semblait normal ; pas besoin de déranger le Bon Dieu pour un évènement passager ! Didier se mit à prier comme les autres. L’orage cessa. Je compris qu’il faisait partie de ‘la manifestation’. Les nuages se dissipèrent aussi vite qu’ils s’étaient accumulés. Je me sentis manipulé. 

Je rentrai chez moi. De toute façon, je ne me serais pas assis ; quand le soleil se fit à nouveau, les gradins étaient mouillés. 

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